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Ce que dit Rose
24 août 2008

A la radio – et les « royaumes de l’irréel »

Mon feuilleton de « l’été d’écrivains » : mardi, j’ai aimé la passion qu’a mis Brigitte Aubert à évoquer ses recherches pour écrire un volume « Grands détectives » (10/18) qui se passe dans le milieu du cinéma, à ses débuts. Elle parle de détails, de la montre-bracelet qui n’existait pas à l’époque où se déroule son roman, de la façon de désigner les heures de l’après-midi (14h etc) qui date d’après la 1e guerre… Mercredi, je me demande si Erzébeth écoute Nina Bouraoui parler avec une voix très fraîche de son dernier roman (et de la passion en général). Vendredi, je suis en train de nettoyer le frigo pendant qu’Amélie Nothomb et l’animatrice lisent à deux voix un extrait du nouveau roman de l’auteur, drôle, vive, une voix à vous raconter des histoires, à en inventer des tonnes, la voix d’un personnage de roman de Nothomb.

 

***

 

Au musée d’art brut de Lausanne, on voit bien qu’il n’est pas toujours facile de faire la part de l’art et de l’écriture. Au rez-de-chaussée, une exposition consacrée à des artistes bruts japonais montre les travaux d’un jeune homme qui couvre des pages d’idéogrammes, très lentement, et il s’interrompt la plupart du temps en cours de travail, pour des raisons mystérieuses. Un autre se crée des cahiers en attachant par une ficelle des liasses de feuilles couvertes de motifs qui forment une écriture, déchiffrable par lui seul ; c’est son journal, il y consigne en particulier la température de chaque jour.

Et tout en haut du musée, il y a les feuillets d’Henry Darger, un autre passionné de météorologie qui, paraît-il, consignait dans son journal chaque jour le temps qu’il faisait et les erreurs des bulletins de météo. Mais Darger est surtout l’auteur d’une grande fresque de 15000 pages, une sorte d’épopée illustrée de gigantesques aquarelles réalisées sur des feuilles de papier collées les unes aux autres. Ses héroïnes, les Vivian Girls, des petites filles aux visages décalqués dans des magazines et… au sexe masculin, passent leur temps à fuir des soldats égorgeurs d’enfants, des tornades ou des monstres ; ce ne sont que batailles, scènes de torture ou de dévastation, en une lutte sans fin entre Bien et Mal. Les aquarelles montrent souvent des petites filles qui jouent, qui sont heureuses, tandis que dans un coin se profile déjà le danger. Si les illustrations exposées sont fascinantes, parce qu’elles sont foisonnantes, mais aussi parce qu’elles sont répétitives (du fait des silhouettes décalquées que l’on retrouve partout et aussi du sujet des scènes) et parce qu’elles sont très étranges (imaginez, je ne sais pas, Candy un fusil à la main en pleine guerre de Sécession – et nue en plus ; j’allais dire Martine, mais certain site générateur de titres s’est déjà chargé de lui arracher son diplôme de petite fille modèle), c’est leur créateur qui me passionne, cet homme solitaire et discret, qui a consacré toute sa vie à cette œuvre sans fin (dont tout le monde ignorait l'existence), une sorte de conjuration, à la fois pure et malsaine, des malheurs dont son enfance a été semée (il se veut protecteur des enfants). On m’a offert un livre édité à l’occasion d’une exposition (« Bruit et fureur : l’œuvre de Henry Darger ») qui permet de voir dans de bonnes conditions ses aquarelles (leur format est si grand que les reproductions sont généralement décevantes), mais c’est aussi cette grande œuvre que je voudrais lire ; et son journal, celui des remarques météo, ou son autobiographie qui fait plus de 5000 pages…

darger1

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Commentaires
R
Je l'ai aussi ;) (mais ce n'est aussi agréable que d'écouter l'émission une soirée d'été, les confidences deviennent un peu questionnaire)
L
J'ai aussi écouté cette émission (en différé comme on nous le propose sur le site de Radio France)et j'ai depuis trouvé un petit bouquin en Librio intitulé "Un été d'écrivains" et daté de 2002. On y retrouve ni Brigitte Aubert ni Amélie Nothomb, mais on y trouve bien Nina Bouraoui interviewée en 1999...
R
A découvrir ! (j'ai un faible pour l'art brut)
V
Déroutant de DARGER, de l'horreur, de la douceur et de la stupéfaction...
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