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Ce que dit Rose
6 août 2009

Elle était la reine de Montparnasse…

… et elle y a côtoyé les plus grands, Kisling, Foujita, Man Ray, Desnos ou Jean Cocteau. Elle fut leur modèle, leur muse, leur maîtresse. Elle était gaie (alors que son enfance la prédestinait à une existence terne d’enfant bâtard). Mais après le succès, la chute.

Le nom de Kiki de Montparnasse reste associé pour moi à une chanson de Juliette, Rimes féminines, dans laquelle elle fait la liste des femmes en lesquelles elle souhaiterait être réincarnée, si d’aventure elle pouvait choisir. La liste est longue, certains noms me sont restés inconnus, mais je me souviens très bien que c’est un peu grâce à Juliette que j’ai lu Lou Andréas-Salomé ou Anaïs Nin. Elle fait rimer Maria Callas et Kiki de Montparnasse, bien que leurs répertoires aient été pour le moins différents…

kiki_ray

Le roman graphique de Catel & Bocquet qui reprend en couverture le célèbre « Violon d’Ingres », la photographie de Man Ray qui transforme le corps de Kiki en violon, la sublimant en égérie et en amante, entend faire connaître cette « figure » du Montparnasse des Années folles. Sa vie était son œuvre, elle a laissé des mémoires pleines d’anecdotes savoureuses. Hélas, comme le soulignait Ekwerkwe, le roman graphique peine à dépasser l’illustration méthodique des grands moments de la vie de Kiki. « Kiki, c’est Kiki ! » rappellent régulièrement les personnages, et on devine qu’il s’agissait d’une femme flamboyante. Mais Kiki n’est dans la BD qu’un personnage sympathique qui ne semble être qu’un instrument des révolutions artistiques, et dont le chemin vers la création ne nous est pas montré : Kiki va d’amant en amant, et accessoirement peint, écrit, chante, sans que cet aspect soit excessivement étudié.

Dommage que les auteurs n’aient pas choisi un parti-pris plus audacieux pour faire le portrait d’une femme que nous connaissons à travers des regards si divers.  La BD n’en reste pas moins fort intéressante, mais plus comme une sorte de compte-rendu de la vie artistique de cette époque. Elle est dénuée de cette liberté qui semble si chère à Kiki. Et plus contrariant, à mon avis, elle abandonne Kiki à l’aube du déclin : les vingt dernières années de sa vie sont expédiées en deux chapitres, comme si Kiki n’existait que belle, entourée d’artistes, courtisée par tous. Quid de cet accordéoniste qui prit soin d’elle jusqu’à la fin ? On retrouve le même irritant désintérêt pour les figures de second plan dans les biographies de fin de volume : rien sur Maurice Mendjisky, le peintre qui la surnomma Kiki et avec lequel elle vécut quatre ans, alors qu'on nous présente Picasso, qu'elle ne fréquenta pas vraiment.
(Enfin, il faut tout de même reconnaître que la chronologie de la vie de Kiki et les biographies de ses contemporains m’ont beaucoup intéressée ; certaines sont fort bien écrites, et elles permettent de découvrir les personnalités attachantes de Foujita ou Kisling, ou la dernière histoire d’amour tragique de Modigliani.)

foujita

Un travail bien documenté, donc, mais un peu raté, qui nous berce de pas mal de clichés et ne transforme jamais la vie de Kiki en destin tragique, alors que c'est visiblement le projet des auteurs.

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Commentaires
R
Le personnage de Kiki m'a laissé un grand souvenir et j'ai aimé me replonger dans l'ambiance de la BD cet automne à l'expo sur la photo surréaliste (et voir à Roubaix un tableau de Foujita, qui ne représente pas Kiki, mais qui évoque cette vie de bohème de café en café) ; c'est dommage que ce beau projet de BD tourne un peu court, ça aurait pu être (encore) mieux !
M
Même si l'article que j'ai fait sur cette BD est plus élogieux, je partage ton point de vue : Kiki existe plus en tant que muse qu'artiste dans ce livre, et on ne la suit pas dans les années noires de la fin. Dommage. <br /> <br /> La fin est expédiée, et cela m'a frustrée, d'autant plus que je ne voyais aucune raison à ce que le livre soit si court? Est-ce que les éditeurs l'ont estimé trop... volumineux? Allez savoir. <br /> <br /> Cela dit, ce qui m'a touchée dans ce livre, c'est que la vie intime de Kiki est tout de même abordée, ainsi que son passé et ses blessures. <br /> <br /> Comme toi, j'ai été déçue de ne trouver aucune information sur Mendjiski, dont je ne sais rien. Alors que, tu le soulignes parfaitement, certains personnages qui font des apparitions rapides ont droit à leur bio : Lee Miller, Picasso... snobisme? <br /> <br /> Quoiqu'il en soit, cette BD m'a passionnée, et j'ai beaucoup aimé le dessin.
R
Ah non, je ne connais pas ! j'aimerais aussi bien lire à l'occasion les mémoires de Kiki... Je pense que la BD les suit de près, mais il y a un petit truc qui ne va pas, peut-être qu'il aurait mieux valu un récit rétrospectif de son point de vue ; et comme elle ne va pas plus loin que les années 30, je pense que ça explique la rapidité de la fin de la BD.
V
J'étais toujours fascinée par Kiki depuis que j'ai lu Memoirs of Montparnasse par John Glasco - le connais-tu? Maintenant j'ai hâte de décourvrir de roman.
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